La Traviata de Giuseppe Verdi (Opéra de Montréal)

 

La Traviata de Giuseppe Verdi (Opéra de Montréal)


D.I., Delinkan Intellectuel, revue d'actualité et de culture, in Societas Criticus Vol. 26-03 : www.societascriticus.com


Argument


Entretenue par le riche baron Douphol, la courtisane Violetta, artiste de cabaret noire, s’étourdit dans le luxe et les plaisirs pour oublier la terrible maladie qui menace ses jours. Lors d’une fête qu’elle donne chez elle, elle se laisse séduire par Alfredo, dont la ferveur parvient à la détourner de sa vie dissolue.


Ayant tout abandonné, Violetta croit pouvoir vivre son amour avec Alfredo à la campagne, loin de l’agitation de Paris; mais pour gouter ce bonheur, la jeune femme doit vendre ses biens. Vient le père d’Alfredo, Giorgio Germont, qui supplie Violetta de rompre avec son fils, car sa liaison avec une courtisane est un scandale qui rend impossible le mariage de sa jeune sœur. Violetta refuse de renoncer à son amour, puis elle finit par céder aux prières de Germont. Laissant croire à Alfredo qu’elle le quitte pour retrouver son ancien protecteur, Violetta accepte de se rendre à une fête où elle apparait au bras de Douphol. Fou de douleur, Alfredo rejoint Violetta qu’il insulte publiquement.


Oubliée et ruinée, Violetta va mourir dans son appartement vidé par les créanciers. Seul l’espoir de revoir Alfredo la maintient encore en vie. Le jeune homme et son père arrivent enfin, mais il est trop tard. La joie des retrouvailles et le réconfort du pardon ne suffisent pas à sauver Violetta qui meurt dans les bras de son amant.


GIUSEPPE VERDI, Compositeur >


D’origine modeste, mais pas autant qu’il s’est plu à le prétendre, Verdi commence ses études chez l’organiste du village, les poursuit auprès du maestro di musica de Busseto et les complète à Milan, alors considéré comme le centre culturel italien, auprès de Lavigna, répétiteur à La Scala



ALAIN GAUTHIER, Metteur en scène >


Metteur en scène apprécié du milieu lyrique, Alain Gauthier continue de faire sa marque en Amérique du Nord. Il signe plusieurs mises en scène pour l’Opéra de Montréal, dont Suor Angelica, Il tabarro, Il barbiere di Siviglia, Pagliacci/Gianni Schicchi (prix Opus du meilleur spectacle de l’année), La bohème, L’étoile (…)


Distribution


Chef d'orchestre : JORDAN DE SOUZA, Canada


Violetta Valéry : TALISE TREVIGNE, États-Unis

Alfredo Germont : ANTOINE BÉLANGER, Canada

Giorgio Germont : JAMES WESTMAN, Canada

Flora Bervoix : ILANNA STARR, canado-américaine

Marquis d'Obigny : GEOFFREY SCHELLENBERG, États-Unis

Gastone : ANGELO MORETTI, italo-canadien

Annina : CHELSEA KOLIĆ, canado-croate

Baron Douphol : MIKELIS ROGERS, Letton-Canadien

Docteur Grenvil : JEAN-PHILIPPE MC CLISH, Canada

Giuseppe : JAIME SANDOVAL, Canada/Mexique


Source : https://www.operademontreal.com/programmation/la-traviata



Commentaires de Michel Handfield, M.Sc. sociologie (2024-05-18)


D’abord, j’ai trouvé que La Traviata fut joué plusieurs fois à l’Opéra de Montréal (1), mais dans mon cas c’est la première fois que je l’ai vu. (2) J’aurais dû la voir en septembre 2020 avec une Violetta interprétée par Marie-Josée Lord (3), mais cette saison fut abolie vu la pandémie de COVID-19.


Dès le début j’avais une impression de déjà vu et j’ai rapidement réalisé que je l’avais vu au théâtre dans une version inoubliable de La dame aux camélias avec Anne-Marie Cadieux en 2006 ! (Voir notre texte en Annexe) Cette Traviata de l’Opéra de Montréal sera aussi inoubliable. D’ailleurs, les applaudissements furent nombreux durant la représentation. Pour ceux qui croient l’opéra guindé, je dirais que c’est de plus en plus démocratique. On a droit au surtitre en français et en anglais sur un écran en haut de la scène, ce qui permet de mieux suivre et comprendre l’histoire. De plus, « [u]ne heure avant le lever du rideau, le musicologue Pierre Vachon vous donne quelques clés pour mieux apprécier la représentation » pour ceux que cela intéresse. (4)


La Traviata est donc un opéra de Giuseppe Verdi sur un livret de Francesco Maria Piave en italien d'après le roman La dame aux camélias d’Alexandre Dumas fils. (5) Le tout commence de manière festive dans un beau décor, car Violetta est une courtisane bien branchée. Son protecteur est le riche baron Douphol.


Tant qu’elle se donne à son protecteur et à la bonne société, pour les divertir, son train de vie est assuré. Mais, quand elle se met en couple avec Alfredo pour vivre une vie plus rangée, tout cela s’étiole. Mais, pas sa réputation, qui la suit, et met dans l’embarras la famille d’Alfredo.


On a beau être près de 200 ans plus tard, car ce roman fut publié en 1848, c’est toujours la même chose : ce qu’on a fait dans le passé nous suit. C’est encore plus vrai aujourd’hui avec l’internet et les réseaux sociaux. L’anonymat qu’assure la grande ville et les droits et libertés qui nous protègent des dérives institutionnelles n’effacent pas la mémoire collective et encore moins numérique. Les ragots, les allusions, les rumeurs seront toujours là. (6) Et, ce sera encore pire demain, avec l’intelligence artificielle qui permettra de créer de toutes pièces de fausses histoires de vie parfois par pure vengeance. Des réputations pourront être défaites sans aucune raison sauf la jalousie, la vengeance ou pour réécrire l’Histoire. En fait, cela a déjà commencé.


Par amour et par honneur, elle s’est sacrifiée pour le bien de la famille de son concubin à la demande de son beau-père qui lui a dit de s’écarter pour permettre un bon mariage à sa fille, la sœur de son amant, qui n’avait rien à souffrir de cette situation qui compromettait son mariage. Elle en prendra tout le blâme et terminera seule, bien seule, vendant ses biens pour survivre.


Quand Alfredo et son père comprendront tout le mal qu’ils ont fait, ils reviendront s’excuser. L’amour n’était pas éteint entre les deux amants, mais ne pourra la sauver. Il est revenu trop tard. Par contre, elle partira en paix dans les bras d’Alfredo.


En annexe vous trouverez une analyse plus en profondeur de cette pièce, car à l’époque où je l’ai vu au TNM (2006) je pouvais prendre des notes sur mon « PALM ». (7) Aujourd’hui, on ne peut plus le faire sur un cellulaire et je trouve cela bien difficile de prendre des notes sur papier dans l’obscurité, écrivant parfois une note sur une autre. Ça devient rapidement illisible. Alors, mes textes n’ont plus la même profondeur d’analyse.


Notes


1. Claude Gingras, Un record pour La Traviata, LA PRESSE, 17 sept. 2012 :

https://www.lapresse.ca/arts/musique/musique-classique/201209/17/01-4574832-un-record-pour-la-traviata.php


J’ai aussi écrit à l’Opéra de Montréal et un agent de billetterie m’a répondu que La Traviata fut jouée à l’Opéra de Montréal en 1972, 1981, 1984, 1993, 1998, 2002, 2006, 2012 et en cette année 2024.


2. Si je me fie à mes archives, le premier opéra que j’ai couvert fut Les pêcheurs de perles en 2008 (Societas Criticus, Vol. 10 no 6, du 8 octobre 2008 au 4 décembre 2008) et le dernier RUSALKA (Societas Criticus, Vol. 13 no. 11, du 2011-11-15 au 2011-12-13). Vous trouverez le lien vers nos archives à la fin de cette note.


En 2019, je me suis donc abonné à l’Opéra de Montréal, car ça me manquait. C’est ce qui fait que je fais parfois un court texte quand je considère avoir de quoi de différent des autres à dire sur le sujet, mon angle étant sociopolitique. C’est que l’art est souvent un révélateur de nos comportements et d’un contexte social et politique qui existe toujours, que ce soit même en partie ou en latence ! Parfois, l’opéra peut même nous montrer que certains débats remontent loin dans l’Histoire et ne seront jamais résolus quoiqu’on pense. Je peux donner l’exemple du multiculturalisme qui traverse en partie l’opéra Salomé. J’en ai parlé dans Salomé, les Hommes et Dieu !, Societas Criticus Vol. 13 no. 4, du 2011-03-12 au 2011-04-01 :

https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/61248?docref=EbayXngjBi0AXM9hQ3AvVA


Nos archives à BAnQ :

https://numerique.banq.qc.ca/patrimoine/details/52327/61248


Nos archives à BAC :

https://epe.lac-bac.gc.ca/100/201/300/societas_criticus/



3. J’avais conservé quelques informations dans mes archives :


LA TRAVIATA de Giuseppe Verdi


Inspirée du destin unique de Joséphine Baker, cette toute nouvelle version du fameux opéra de Verdi met en lumière le talent de la grande soprano québécoise Marie-Josée Lord. Un amour passionné qui défie les conventions, avec le Paris des années 30 en toile de fond.


Distribution


Violetta : Marie-Josée Lord

Alfredo :Rame Lahaj

Germont : Jean-François Lapointe

Flora : Pascale Spinney

Chef : Jordan De Souza

Metteur en scène : Alain Gauthier

Production : Opéra de Montréal, Edmonton Opera, Manitoba Opera, Pacific

Opera Victoria, Vancouver Opera

Chœur de l’Opéra de Montréal / Orchestre Métropolitain


4. https://www.operademontreal.com/communaute/preopera


5. https://fr.wikipedia.org/wiki/La_traviata


6. Un livre intéressant et toujours d’actualité sur le sujet même s’il est loin d’être récent : Morin, Edgar, 1969, La rumeur d'Orléans, France : Seuil.


7. https://fr.wikipedia.org/wiki/Palm_(entreprise)


Annexe – Tiré à part de Societas Criticus, Vol. 8 no. 6. 6 septembre 2006


LA DAME AUX CAMÉLIAS (TNM), avec quelques corrections, certaines données n’étant plus accessibles ou pertinentes. De plus, nous sommes passés à la nouvelle orthographe depuis, ce qui peut avoir conduit à quelques corrections de mots.


« IL FAUT MOINS M’AIMER ET MIEUX ME COMPRENDRE. » MARGUERITE GAUTIER


Texte officiel


TEXTE DE RENÉ DE CECCATTY D’APRÈS LE ROMAN D’ALEXANDRE DUMAS FILS



MISE EN SCÈNE DE ROBERT BELLEFEUILLE. DANS LES RÔLES DE MARGUERITE GAUTIER ET ARMAND DUVAL ANNE-MARIE CADIEUX ET SÉBASTIEN RICARD


AU THÉÂTRE DU NOUVEAU MONDE DU 5 AU 30 SEPTEMBRE 2006


AMOUREUSE, MORTELLEMENT


Je t’aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie. Marguerite est une fleur dont on arrache les pétales un à un, une fleur vénéneuse, une fleur du mal et pourtant pure, d’une pureté corrompue au contact du monde et des hommes. Avilie par ses amants, rejetés par eux, Marguerite, cette courtisane immortalisée à l’opéra sous les traits de « la traviata », rêve de se réhabiliter par l’amour et croit que le destin ne l’a vouée qu’aux plaisirs frivoles. À la fois ange et démon, sublimement généreuse, la dame aux camélias aime. Passionnément, confusément, absolument. Aime jusqu’à en mourir. Et laisse dans la mémoire des pauvres handicapés de l’amour que nous sommes le souvenir ému de sa vertu et de sa candeur. «Cette fille était un ange», dira d’elle Armand Duval, le seul homme qui ait su vraiment la comprendre sans pour autant parvenir à la saisir, elle qui portait en elle plus de pureté et d’amour que nous tous…


LE DERNIER AMANT ROMANTIQUE


La Dame aux camélias fit scandale lors de sa création au théâtre en 1852. Aux yeux des bienpensants, le fils naturel de l’auteur des Trois Mousquetaires s’y livrait à la glorification romantique de l’adultère, lui qui pourtant croyait qu’il fallait mettre le théâtre au service des grandes réformes sociales et des plus grandes espérances de l’âme. Dumas fils doit son entrée au panthéon des lettres françaises à cette grande œuvre romantique, qui fut d’abord un roman qui arracha des larmes dès 1848 et lui valut, quatre ans plus tard, le plus grand succès dramatique de son temps.


UNE «ADOPTION» DE DUMAS


Ce n’est pas le texte de Dumas qui enflammera la scène du TNM, mais la version qu’en a signée l’écrivain René de Ceccatty, à l’intention tout d’abord de l’actrice Isabelle Adjani. Tout semblait prédestiner Ceccatty à revenir à l’œuvre de Dumas fils, à redonner à cette histoire de passion tragique et d’amour mythique toute sa force et son frémissement. Plus qu’une « adaptation », sa Dame aux camélias est une « adoption » du roman de Dumas. Plutôt que de dégager la pièce de ses enflures et de ses emphases, il est revenu au roman et en a fait une fable où la maladie d’amour qui affecte Marguerite, cette maladie qui n’a pas de nom, renvoie à une réalité qui est redevenue la nôtre un siècle et demi plus tard.


MOURIR NOYÉE D’AMOUR


Né à Tunis en 1952, essayiste, traducteur, critique au journal Le Monde, directeur de collection, celui qui a dépoussiéré et revitalisé La Dame aux camélias est également romancier. La passion d’écrire de René de Ceccatty ne fait qu’un avec son désir de maintenir intact et inconsolé le scandale de l’amour non partagé. D’un livre à l’autre, toujours il parcourt le même espace tragique : celui de la souffrance d’aimer, celui de l’impossibilité de rejoindre l’autre. Dans L’Accompagnement, un malade lutte contre la mort, en présence d’un ami qui l’accompagne. On pense déjà à La Dame aux camélias...


Dans Aimer, Consolation provisoire et L’Éloignement, il parle avec une impudeur pudique d’un homme qu’il aime et qui ne l’a jamais aimé. « Ne me pardonne pas / Car pour aimer je dois / Mourir noyé d’amour » : cette pensée inscrite en exergue à son roman Aimer ne résume-t-elle pas tout entier la passion fiévreuse de Marguerite Gautier ?


DU PÈRE AU FILS


L’acteur ROBERT BELLEFEUILLE a participé à moult créations qui sont devenues des classiques, que l’on pense seulement à la mythique Trilogie des dragons de Robert Lepage; le metteur en scène ROBERT BELLEFEUILLE aborde les classiques comme s’il s’agissait de créations : son doublé Edmond Dantès et Le Comte de Monte-Cristo, présenté au Théâtre Denise-Pelletier, le démontrent hors de tout doute. Homme de théâtre polyvalent, qui écrit, joue et signe des mises en scène, ROBERT BELLEFEUILLE, qui a asséné un grand coup il y a deux ans avec Jouliks au Théâtre d’Aujourd’hui, qui est directeur général et artistique du Théâtre de la Vieille 17, une compagnie qui contribue allègrement à la vitalité de la dramaturgie franco-ontarienne, qui est en outre directeur du programme de mise en scène à l’École nationale de théâtre, fait son entrée au TNM en passant de papa à fiston, d’Alexandre Dumas père à Alexandre Dumas fils.


UNE HIRONDELLE INSAISISSABLE ET FRAGILE


Depuis des années, ANNE-MARIE CADIEUX plane sur le théâtre comme une hirondelle insaisissable et fragile, souvent annonciatrice d’orages et de turbulences, frôlant de son aile brisée le paysage qui est le nôtre pour mieux nous entrainer à cœur et à corps perdu vers des territoires inconnus. Strindberg, Koltès, Ingeborg Bachmann, Heiner Müller, Dacia Maraini, Réjean Ducharme, même Feydeau : autant de perles noires dont le collier est une actrice capable des plus grands vertiges et des plus bas instincts, et qui, d’un rôle à l’autre, explore nos grandeurs et nos misères. Comédienne en apesanteur à la présence ensorcelante et fascinante, ANNE-MARIE CADIEUX a été associée aux créations les plus aventureuses, que ce soit avec Brigitte Haentjens, Robert Lepage ou Lorraine Pintal, et toujours refuse la sécurité et les modèles standards pour mieux l’aventurer et nous entrainer avec elle vers le dérèglement de tous les sens. Avec Combat de nègre et de chiens, Marie Stuart, et L’Hiver de force, elle a laissé sur la scène du TNM une empreinte ineffaçable. Empreinte aujourd’hui marquée au fer rouge grâce à ce face-à-face brulant et passionné avec Sébastien Ricard, le Batlam de Loco Locass, ce rapeur acteur qui fuit toujours la tiédeur. ANNE-MARIE CADIEUX qui, dans tant de ses rôles, impose l’élégance majestueuse du crépuscule devient aujourd’hui Marguerite Gautier : une rencontre au sommet de deux icônes d’une fragilité bouleversante.


Avec ÉRIC BRUNEAU; ANNE-MARIE CADIEUX; GINETTE CHEVALIER; BÉNÉDICTE DÉCARY; FRANÇOIS-XAVIER DUFOUR; GEOFFREY GAQUERE; AUBERT PALLASCIO; SÉBASTIEN RICARD; PAUL SAVOIE; MONIQUE SPAZIANI.


Assistance à la mise en scène et régie DIANE FORTIN; décor JEAN BARD; Costumes FRANÇOIS BARBEAU; éclairages ETIENNE BOUCHER; musique LOUISE BEAUDOIN; maquillages et coiffures ANGELO BARSETTI; perruques RACHEL TREMBLAY;accessoires GHISLAIN GAGNON.


Commentaires de Michel Handfield (10 septembre 2006)


Quand on a que l'amour

À s'offrir en partage

Au jour du grand voyage

Qu'est notre grand amour


Jacques Brel. (2CD – Barclay/Polygram 845-001-2)


Voilà cette pièce en quelques vers, car elle est universelle et hors du temps. C’est Brel, Zola (Nana), le cinéma, et la tragédie grecque !


Actuel!


La dame aux camélias « est un roman d'Alexandre Dumas fils publié en 1848, inspiré d'un fait divers réel : l'amour d'Agénor de Gramont (1819-1880), duc de Guiche, futur ministre des Affaires étrangères de Napoléon III, pour la courtisane Marie Duplessis. » Ces personnages se sont retrouvés sous les noms de Marguerite Gautier et d’Armand Duval dans le roman. (1) La pièce, qui fut actualisée, est criante de vérité. J’ai pris une vingtaine de feuillets de notes sur mon Palm… et j’aurais pu en prendre davantage.

Marguerite, la dame aux camélias, est jouée avec brio par Anne-Marie Cadieux. Elle est criante de vérité; vérités qui sont aussi actuelles qu’à l’époque. D’ailleurs, la société bienpensante qui la fréquente pense d’elle qu’elle est « dangereuse parce qu’elle a plus de cœur et d’esprit que les autres. » Elle, elle est très lucide sur son état et le monde qui l’entoure, car malade et mourante, on la délaisse : dans ce monde, l’on n’a d’amis que si l’on se porte bien. Les hommes sont aussi bas avec les morts qu’ils le sont avec les vivants. Ils sont surs de l’assurance que donnent le préjugé et l’ignorance !


Ses réflexions et ses états d’âme, au-delà des fariboles de bon aloi que nécessite sa condition de courtisane, sont percutants et justes. Aucun sujet ne lui échappe. Elle était une femme forte. Aujourd’hui, elle aurait été féministe, politicienne, vedette de la télé ou femme d’affaires! Elle servait le plaisir et la vanité des hommes et leur faisait bien payer en retour comme elle le disait, car elle est l’objet de pouvoir et de richesse. Un bijou que l’on affiche à son bras! Même si la femme n’avait pas le droit de vote à l’époque, on voit bien que certaines d’entre elles menaient les hommes par le bout du nez pour ne pas dire de la queue!


Sur la morale…


Ainsi, écrit, cela peut paraitre amoral. Mais Marguerite, elle, elle dit qu’on peut bien dire les choses crument, car cela évite de camoufler ce que tout le monde sait de toute façon! Et ce dont tout le monde parle de toute manière!


La dame aux camélias a des principes qui vont au-delà de la morale, ce qui permet justement de la questionner. Qui sert-elle? La morale, est-elle hypocrite? Une façon d’interdire qui relève davantage du pouvoir que du bon sens? Ce sont là des questions encore d’actualités ici et ailleurs.


Et, pourquoi la morale n’est pas la même pour les hommes – qui la font et l’imposent souvent? Pourtant, hommes et femmes sont les deux côtés d’une même pièce de monnaie que l’on appelle l’humain!


Sur l’amour et la prostitution ♥


L’amour, qu’est-ce pour une telle femme? Un vertige! C’est la première fois que je ne vends pas mon corps. Pour elle cela dit tout, car c’est se donner. L’amour est gratuit, le sexe est un commerce! Cette question de la séparation du sexe et de l’amour a existé de tout temps et risque d’exister bien longtemps encore. Elle est au cœur de la relation entre Marguerite Gautier et Armand Duval (Sébastien Ricard).


Mais l’homme qui aime veut l’exclusivité, la posséder, alors que pour elle, les hommes sont des clients et lui, son homme, est l’amour! Et si elle lui assure l’exclusivité pour un temps, l’éconduit qui la soutient, le duc de Bassano (Albert Pallascio), se sentira trahi; commercialement et émotivement trahi : J’ai cru qu’elle avait besoin d’un père, elle avait besoin d’un banquier pour s’offrir un amant!


La femme derrière la prostituée vit donc une situation schizophrénique. Si cela était vrai à l’époque, ce l’est toujours aujourd’hui. Ce ne sont ni les lois, la morale, l’éthique, la décriminalisation ou la légalisation de la prostitution qui règleront cette épineuse question, car elle est d’un autre niveau. Elle est profondément humaine. J’insiste, humaine, car la prostitution existe depuis que le monde est monde; depuis que la femme s’est aperçue qu’elle peut être objet de désir dans les yeux d’un homme et que celui-ci est prêt à payer pour la posséder quelques instants. Pour avoir accès à son triangle d’amour. C’est une question animale encore inscrite dans certains gènes, comme chez certaines espèces où le mâle apporte du gibier à la femelle convoitée. La loi et la morale n’y peuvent rien.


Conclusion


On parle souvent de l’évolution. Cela est vrai au plan technique. Mais au plan social et politique, qu’en est-il? Au plan humain, a-t-on évolué? La question se pose puisque la trame de la dame aux camélias est toujours aussi vraie qu’à l’époque où elle fut écrite tout comme sont encore vraies les observations des philosophes d’il y a quelques millénaires sur le même sujet! On est prisonnier de notre temps et des préjugés de notre espèce. « SOI », est une pièce dans un puzzle beaucoup plus grand que nous et qui nous écrase la plupart du temps, que ce soit par la tradition, la culture (au sens restreint du terme), la morale, l’idéologie ou le destin. La dame aux camélias, un drame humain qui est encore à l’affiche tous les jours dans une rue de votre quartier, de votre village ou de votre ville!

Note :


1. http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Dame_aux_camélias




Posts les plus consultés de ce blog

Mes Rendez-vous Québec Cinéma 2024

La Reine Garçon (Opéra de Montréal)

Comment faire l'amour / How to have sex